<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Les Romains sont-ils cruels ? Mythes et réalité des gladiateurs

18 juillet 2018 | Antiquité, N°1 Histoire Magazine

Temps de lecture : 11 minutes
Photo : le célèbre « Pollice verso » du peintre Jean-Léon Gérôme (1872). Collection particulière
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Les Romains sont-ils cruels ? Mythes et réalité des gladiateurs

par | Antiquité, N°1 Histoire Magazine

En 1872, le peintre Jean-Léon Gérôme peint son célèbre tableau « Pollice verso ». Sans le savoir, ce génial illustrateur vient de forger certaines idées reçues qui seront pour longtemps attachées à la gladiature. Au premier rang de ces certitudes se trouve la cruauté des Romains. Celle-ci est symbolisée par la souffrance du vaincu et l’exaltation des vestales qui réclament sa mort. Le pouce « renversé » pour demander la mort constitue une autre invention
qui a la vie dure. Aujourd’hui encore, ce geste créé par Gérôme symbolise le goût du sang que l’on attribue aux fils de la louve. Depuis sa création, cette peinture est systématiquement utilisée comme illustration lorsqu’il est question de gladiature. La référence obligée à ce tableau dépasse d’ailleurs le cadre des historiens car il influence également le monde du cinéma depuis le premier péplum d’Enrico Guazzoni (« Quo vadis » en 1912) jusqu’aux plus récentes productions hollywoodiennes. Mais si nos images sont faussées, quelle est donc la réalité historique de ce phénomène ?

La « protogladiature »

Tout d’abord, la gladiature constitue un phénomène complexe qui touche la plupart des sociétés antiques sur plusieurs siècles. De ce fait, ces combats ont connu des formes diverses et plusieurs phases d’évolution. La première gladiature s’inscrit incontestablement dans un contexte rituel et funéraire. Le plus ancien témoignage littéraire d’un duel en armes organisé en l’honneur d’un défunt illustre se trouve au chant XXIII de l’Iliade. Dans ce récit, Homère décrit un combat rituel opposant Ajax et Diomède armés du bouclier et de la lance. Ce combat est organisé à l’occasion des funérailles de Patrocle et il constitue le point d’orgue d’un ensemble d’épreuves qui ont lieu avant ce combat. Organisées par Achille, ces épreuves sont dotées de prix importants et les meilleurs champions s’affrontent lors de courses de chars, des courses à pied, des lancés du poids et du javelot ainsi qu’au pugilat et à la lutte. Parmi ces compétitions, le duel en arme constitue un affrontement rituel intense. Personne n’oblige les deux combattants à s’affronter. Leur démarche est volontaire et vise tout à la fois à honorer le mort et à apparaître comme les champions de leur camp. Si le but visé n’est pas la mort, celle-ci est envisagée comme une possibilité admise par les deux guerriers. C’est justement la probabilité d’une issue fatale qui entraîne la cessation du combat par l’intervention du public qui constitue un acteur important de l’affrontement. Ces caractéristiques que sont la ritualisation, le caractère volontaire des acteurs, le désir de gloire, les récompenses, le rôle du public et celui de l’organisateur correspondent déjà parfaitement à certaines réalités fondamentales de la gladiature.

Après Homère, ce type de combat se retrouve dans d’autres civilisations méditerranéennes. Les témoignages les plus explicites se trouvent sur les murs des tombes peintes de Paestum qui sont illustrées de combats funéraires en armes (Doc 2a et 2b). De l’Italie du sud, ces coutumes sont ensuite adoptées par les Étrusques pour passer enfin aux Romains au IIIe siècle av. J.-C. « Le premier spectacle de gladiateurs, offert à Rome fut donné sur le forum aux bœufs (forum boarium) sous le consulat d’Appius Claudius et de M. Fulvius (264 av. J.C). Il fut donné par Marcus et Decimus fils de Brutus pour rendre les honneurs funèbres aux restes de leur père »
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Ce premier combat offert aux citoyens de Rome n’oppose alors que trois paires de gladiateurs mais au fil du temps le nombre des combattants s’accroît pour atteindre plusieurs centaines au temps de César. Durant cette période qui dure trois siècles, les Romains développent une notion fondamentale de la gladiature, celle des « armaturae ».

Les armaturae ethniques de la République

Ce terme est souvent traduit de manière fautive par « armure ». Cette traduction littérale induit une mauvaise perception du gladiateur que l’on imagine recouvert de l’armure des chevaliers de la fin du Moyen Age. En fait, la traduction la plus juste serait celle de l’équivalent grec d’armatura, c’est-à-dire πανοπλια (panoplia) . En effet, la panoplie constitue un ensemble cohérent d’équipements qui ne sont pas interchangeables entre eux. Ce caractère très normatif de la gladiature constitue une autre donnée importante qui n’est jamais prise en compte par le cinéma.

Cette notion d’armatura n’est pas une invention romaine. Elle apparaît à Capoue dès 310 av. J.-C. D’après TiteLive, les Romains et leurs alliés Capouans remportent cette année-là une importante victoire contre les Samnites. Ces derniers alignent des guerriers aux splendides équipements avec des boucliers ornés d’or ou d’argent. Après leur victoire, les Romains consacrent les dépouilles précieuses des vaincus aux dieux tandis que les gens de Capoue affectent ces armes à un autre usage. « Les Campaniens, par mépris et par haine des Samnites, s’en servirent pour armer les gladiateurs qui se produisaient au cours des banquets et auxquels resta le nom de samnites »
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La gladiature conserve alors son aspect rituel et funéraire mais intègre un sens nouveau car ces gladiateurs sont présentés dans un cadre festif et spectaculaire. De plus, le fait de mettre en scène les dépouilles de vaincus donne à ces combats un caractère commémoratif. Après avoir adopté cette première armatura « samnite », les Romains créent également le gladiateur « gaulois » en mettant ainsi en scène un autre ennemi fidèle de Rome. Plus tard, à la fin du IIe siècle av. J.-C., alors que les légions plantent leurs aigles en Orient, un troisième gladiateur « ethnique » fait son apparition avec le thrace.

Ce système des armaturae est important à comprendre car il bat en brèche l’illusion souvent colportée de gladiateurs combattant sous des équipements aléatoires pour le seul plaisir cruel des Romains.

Non seulement chaque gladiateur porte une panoplie bien précise et cohérente mais il combat toujours contre un adversaire équipé de la même manière. Cette gladiature républicaine que je qualifie « d’ethnique », demeure rituelle. Comme aux temps archaïques, ces combats sont toujours donnés à l’occasion des funérailles d’un personnage illustre mais leur signification s’enrichit. Qu’ils soient « samnites », « gaulois » ou « thraces », ces barbares sont à présent contraints à se donner en spectacle sous les yeux de citoyens romains. À cette époque, ces milliers de gladiateurs ne sont plus volontaires comme au temps d’Achille. Ces derniers sont des prisonniers de guerre ramenés à Rome au gré de conquêtes de plus en plus lointaines. Au IIe siècle av. J. C., la gladiature devient ainsi un phénomène de masse. Les « écoles de gladiateurs » se multiplient dans toute l’Italie. Dans leurs murs, des milliers d’esclaves savent que la mort est pratiquement inéluctable pour eux. Cette évolution n’est pas sans dangers. Entre 73 et 71 av. J.-C. Spartacus, un gladiateur venu de Thrace, déclenche la pire révolte d’esclaves que Rome ait connue.

La gladiature « technique » du Haut Empire

Au lendemain de la révolte de Spartacus, les Romains prennent conscience du danger. Dans un contexte de conquêtes et de guerres civiles, il est évident que Rome ne peut plus laisser en son sein une quantité d’esclaves experts dans le maniement d’armes et condamnés à mort.

La raison pourrait suggérer de mettre fin à ces combats mais le pragmatisme des Romains permet de contourner le problème en ayant recours à des gladiateurs volontaires. Riche ou pauvre, l’aristocrate, le plébéien, le pérégrin ou l’affranchi peuvent alors s’engager dans cette carrière de son propre chef. Ce faisant, ils renoncent à toutes leurs prérogatives juridiques pour devenir, pendant quelques années, les esclaves de fait du propriétaire d’une troupe de gladiateurs : le lanista. Ce type de gladiateur volontaire est connu sous le nom d’auctoratus, c’est-à-dire « celui qui est autoriser à se vendre ». Le contrat qu’il signe est parfaitement encadré par la loi. Il est préalablement déclaré devant un magistrat qui entérine le contrat signé avec le laniste. En échange de son engagement, l’auctoratus reçoit une prime : le pretium. Ensuite, il prête un serment qui le rejette, provisoirement, au plus bas de l’échelle sociale. Ce serment atteste de façon explicite que ces volontaires entrent dans une carrière à risque en toute connaissance de cause. Sénèque rapporte la formule de ce serment : « Le plus noble et le plus infâme des engagements comportent la même formule. Accepter d’endurer le feu, les fers, la mort par le glaive ».

Ainsi, à la fin du Ier siècle av. J.-C., une nouvelle gladiature « technique » s’est substituée à la gladiature « ethnique ». Dans ce contexte, les armaturae évoluent progressivement afin de donner plus de variétés aux combats. Sous le règne des Julio Claudiens, le couple phare oppose le mirmillon au thrace. Le mirmillon est l’aboutissement de l’évolution du gaulois et du samnite qui ont « muté » pour donner naissance à un gladiateur équipé d’un scutum (grand bouclier cintré), un glaive court et droit et une petite ocrea. En face de lui, le thrace est le seul gladiateur ethnique à perdurer au-delà de l’époque augustéenne. Avec un équipement diamétralement différent, le thrace est alors l’adversaire idéal du mirmillon. Sa parma (petit bouclier) très cintrée, ses deux grandes ocreae et sa sica (glaive recourbé d’origine orientale) permettent de l’identifier immédiatement. Ces deux gladiateurs ont chacun leurs partisans que l’on désigne respectivement sous le nom de scutarii et parmularii. Cette dichotomie souligne bien l’importance du bouclier qui constitue l’élément fondamental qui distingue la technique du mirmillon de celle du thrace. À ce propos, une autre idée reçue doit être évacuée. Il n’existe pas de gladiateur lourd ou léger car ces notions sont inconnues à l’époque antique pour la gladiature. Contrairement à ce qui est souvent affirmé de manière totalement théorique, le thrace n’est pas un gladiateur « léger ». Même si son bouclier est plus petit que celui de son adversaire, le poids de ses deux grandes ocreae métalliques rend sa panoplie plus lourde que celle de son adversaire.
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Aux côtés de ces vedettes du Ier siècle, d’autres gladiateurs sont moins fréquents. Parmi ces derniers, l’eques,  est un gladiateur qui a la particularité de combattre à cheval. Il est également le seul à paraître en tunique dans l’arène. Cette distinction constitue sans doute la marque d’une origine aristocratique de la plupart de ces cavaliers. Équipé d’un casque sans cimier, d’un petit bouclier rond et plat, d’une lance et d’un glaive les equites commencent leurs combats à cheval et le terminent à pied. Plus rares encore sont les essedarii. Attestés par Cicéron, ces combattants sur char sont inspirés des guerriers Bretons qui affrontent César lors de la guerre des Gaules. Ils sont armés d’un bouclier ovale de taille moyenne, d’un casque sans cimier et de deux petites jambières.

Enfin, le provocator se caractérise par un glaive court, un casque sans cimier et un bouclier de taille moyenne. Directement liée à la taille du bouclier, l’ocrea du provocator est également de taille intermédiaire. Plus grande que celle du mirmillon, elle est plus petite que celle du thrace. Ce gladiateur, qui procède du samnite et du gaulois, est toujours opposé à un autre provocator. Si les provocatores peuvent combattre à mort, les armes qu’ils utilisent sont assez souvent dépourvues de pointe sur les nombreuses représentations qui sont parvenues jusqu’à nous. Il semble probable que ce gladiateur constitue la base de la carrière de gladiateur. Une sorte de passage obligé où les nouvelles recrues apprennent les bases techniques avant de se diriger vers telle ou telle armatura. De fait, la gladiature n’est pas toujours sanglante, loin de là. La plupart des combats sont même effectués à glaive « moucheté » car cette activité est avant tout un art martial. La mort n’est un enjeu que pour les seuls grands combats (munera) offerts par les hommes politiques des villes de province ou par l’empereur à Rome.

D’autres armaturae sont également attestées. L’andabata combat ainsi les yeux bandés. Les paenari s’affrontent à coups de fouet et de bâton tandis que les crupelari sont recouverts d’une lourde cuirasse. Cependant, ces gladiateurs très rarement évoqués dans les sources n’ont pas rencontré auprès du public le succès des armaturae les plus techniques et ils sont vite tombés dans l’oubli. En revanche, les femmes gladiatrices ont bien existé pendant au moins deux siècles. Ces combattantes ne sont pas dotées d’un équipement spécifique mais s’affrontent entre elles sous l’armatura des provocatores ou des thraces.

Un combat spectacle très codifié

En même temps que les armaturae, les équipements évoluent également pour s’adapter à un combat spectacle totalement distinct du domaine militaire. Ainsi, à partir de l’époque de César, les casques de gladiateurs deviennent plus élaborés et plus précieux. Ces coiffures ont tendance à protéger de mieux en mieux les gladiateurs par l’adoption de larges rebords et par des protèges joues de plus en plus enveloppants. Cette évolution aboutit, vers le milieu du Ier siècle, à l’adoption de protections faciales qui masquent l’ensemble du visage des combattants. Cette amélioration ne répond certainement pas à des préoccupations humanitaires. En empêchant les blessures les plus graves, les lanistes évitent de perdre trop vite ces gladiateurs qui représentent un investissement important. De plus, le fait de protéger le visage du combattant l’incite à prendre plus de risques afin d’offrir au public une attitude toujours plus offensive. Cette double recherche de la technicité et du spectacle est à l’origine de l’émergence relativement tardive du couple le plus célèbre de la gladiature, le rétiaire et le secutor. Le rétiaire est un combattant exceptionnel sans aucun lien avec le monde militaire. Armé du trident, d’un filet et d’une dague, il ne porte ni casque ni jambière ni bouclier. Les premiers rétiaires font leur apparition dès le début du règne d’Auguste mais ce combattant aussi redoutable qu’original ne trouve pas immédiatement un adversaire à sa taille. Il faut donc attendre l’époque de Vespasien (69-78 ap. J.-C.) pour qu’apparaisse un adversaire à la mesure du rétiaire, le secutor. Au premier abord, ce gladiateur doté d’un scutum et d’une petite ocrea sur la jambe gauche pourrait être confondu avec un mirmillon. Le seul élément qui permette de le distinguer est son casque. Ces protections se caractérisent par une absence de rebord quant à la grille de protection faciale ; elle est remplacée par deux trous circulaires. Enfin, la caractéristique principale de ces casques réside dans un cimier très fin et profilé en forme de demi-lune. Parfaitement adapté au combat anti-rétiaire, le secutor (celui qui poursuit) permet de constituer le couple le plus souvent représenté dans le monde de la gladiature. Sans éclipser totalement les autres armaturae, le rétiaire-secutor connait un succès extraordinaire jusqu’à l’extinction de la gladiature au IVe siècle9 . Le succès de ce couple et le véritable vedettariat qui l’accompagne au IIe siècle ap. J.-C. découlent de l’extraordinaire technicité de ces deux combattants et du caractère spectaculaire de leur affrontement.

Le pouce retourné… une invention de notre temps

Même si ces combattants d’exception sont dressés pour regarder la mort en face, les gladiateurs vaincus peuvent poursuivre leur carrière s’ils donnent satisfaction à leur public. Car la gladiature de l’époque impériale n’est pas la boucherie habituellement représentée au cinéma. Les Romains seraient même dégoûtés s’ils assistaient aux torrents d’hémoglobine que nous mettons en scène. Sur les gradins de l’arène, « l’afficionado » des gladiateurs recherche le suspens, le courage des combattants et la maîtrise de leurs techniques de combat. Ce frisson dure jusqu’à l’instant ultime où chaque spectateur a le sentiment de contribuer à la grâce du héros malheureux ou à la condamnation du lâche. Sur ce point, il faut tordre le cou au cliché le plus fameux de la gladiature. Mille fois représenté dans les tableaux du XIXe siècle, les péplums et les séries télés, le geste de la mort n’est pas celui que l’on imagine. Lorsque le gladiateur blessé ou épuisé s’avoue vaincu et qu’il demande grâce, aucun Romain ne retourne son pouce vers le bas ni vers le haut. Ce geste universellement connu repose sur la mauvaise traduction d’un seul et unique texte de l’écrivain romain Juvénal10.C’est le peintre Gérôme qui commet cette erreur dans son tableau (« Pollice verso » 1872). Les péplums ont donné à ce pouce une renommée universelle. Pourtant, si l’on y réfléchit un peu, le seul fait de comptabiliser un tel « vote » manifesté par les pouces des 50000 spectateurs du Colisée n’a aucun sens sur le plan pratique. En revanche, avant de prendre sa décision, l’éditeur des jeux doit absolument tenir compte de l’avis du public. Sur ses propres deniers, cet homme politique fait un acte de générosité (évergésie) en offrant à ces concitoyens des combats très coûteux. Il ne peut donc prendre la décision finale sans tenir compte du vœu de la foule. Contrairement à nos idées reçues, les Romains demandent la mort bien moins souvent qu’on ne le pense, peut-être dans un ou deux cas sur dix en moyenne. Lorsque le vaincu a bien combattu, l’expression de la clémence populaire prend alors une forme bien visible. En effet, les Romains demandent à l’éditeur des jeux de renvoyer le vaincu vivant (missio), en agitant une serviette (mappa) Ces serviettes constituent une solution pratique qui est toujours utilisée dans le monde de la tauromachie pour accorder des récompenses au torero. En effet, bien plus que le pouce retourné, le fait d’agiter une serviette blanche permet à l’éditeur de jauger la tendance du public à chaque fin de combat. Ce point est important, car la décision souveraine de l’éditeur ne peut être que l’expression de la volonté du peuple. S’il fait égorger un gladiateur que le public veut sauver, il sera taxé de cruauté. S’il renvoie un homme condamné par la foule, il peut être accusé d’avarice, car exécuter un gladiateur professionnel coûte cher. Dans ces deux cas, son verdict serait ressenti comme une grave injustice aux yeux du peuple qui se verrait alors privé d’un pouvoir qu’il est convaincu de détenir. Une fois bien établi, le choix du public est retransmis par l’éditeur au gladiateur victorieux. S’il ouvre sa main avec les doigts dirigés vers le vaincu, c’est la mort. Le vainqueur lui plonge alors une dague effilée dans la poitrine. S’il ferme son poing, c’est la vie pour le vaincu qui est renvoyé debout.

La fin des combats

Cette gladiature technique et les rituels qui l’accompagnent disparaissent dès le IIIe siècle. Bien plus que les anathèmes des chrétiens dont l’écho a contribué à forger la légende noire de la gladiature, c’est la crise économique et sociale de l’Empire qui cause la disparition des gladiateurs. Cette gladiature « technique » constitue un phénomène avant tout urbain. L’économie de la gladiature est alors entretenue par les riches notables des cités, soucieux de s’attacher la considération de leurs concitoyens. Ce système très élaboré ne résiste pas aux bouleversements du IIIe siècle. La rétractation des villes entraîne inexorablement la fermeture des écoles et des amphithéâtres de province. Si Rome et quelques grandes villes d’Italie permettent à la gladiature de subsister encore quelques temps, le phénomène a changé de nature au IVe siècle. En perdant son caractère technique, la gladiature redevient plus brutale et sanguinaire en revenant à l’usage des prisonniers de guerre, comme au temps de Spartacus. Cette gladiature finissante n’est plus que le pâle reflet d’un spectacle qui a largement contribué à cimenter les peuples de l’empire romain autour de leur passion commune pour les arts
martiaux et les techniques de combat. Une passion qui pendant des générations a fasciné tous les Romains, de l’empereur jusqu’au dernier des esclaves.

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À propos de l’auteur
Eric Teyssier

Eric Teyssier

Eric TEYSSIER : Agrégé et docteur en histoire, diplômé en sciences politiques, Éric Teyssier est maître de conférences HDR à l’université de Nîmes. Il enseigne l’histoire romaine, l’histoire de l’art antique mais aussi l’histoire de la seconde guerre mondiale. Auteur de nombreux ouvrages, de biographies remarquées, Spartacus, Pompée, Commode, il a publié en 2018 un premier roman Napoléon est revenu ( Ed. Lemme Edit) et prépare une suite à L’an 40 la bataille de France ( Ed. Michalon).
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