Comment expliquez-vous cette fascination pour Toutankhamon ? Marc Gabolde : Il y a des raisons objectives à cette fascination. En premier lieu, la découverte de la tombe de Toutankhamon est certainement le plus fabuleux trésor archéologique découvert au XXe siècle. Ensuite, la qualité et la conservation des objets sont exceptionnelles. De même, la quantité des pièces et la masse des métaux précieux est hors du commun : le sarcophage d’or de 110kg est sans doute l’œuvre en or d’une seule pièce la plus pesante parvenue jusqu’à nous. S’y ajoute la délicatesse de l’art de l’époque de Toutankhamon. Le visage du roi, sans doute légèrement idéalisé, est empreint d’une grâce une peu mélancolique très attachante. En outre, au moment où fleurit encore en Europe l’Art Nouveau, les vases en calcite du tombeau avec leur transparence et leurs motifs végétaux sont un contrepoint saisissant aux décors des vases et opalines du « style nouille » tel que le désignaient ses détracteurs. Toutankhamon est encore une figure romantique : bel adolescent, mort jeune et entouré d’autant d’or que de mystères. L’époque où il vécut est aussi l’une des plus intéressantes de l’histoire avec l’essor puis la chute du premier monothéisme historique dont le promoteur, Akhenaton, est l’un des plus singuliers souverains de l’Égypte ancienne. L’épouse d’Akhenaton, Nefertiti, dont le buste fut révélé à Berlin un an après la découverte de la tombe, est considérée comme la plus belle femme de l’Antiquité. Elle pourrait bien être la mère de Toutankhamon. Enfin, on ne saurait évacuer la part d’inconnu qui entoure la vie du jeune roi dont l’ascendance est incertaine, les causes de la mort mal déterminées et qui est à l’origine d’une malédiction plus fameuse que réellement mortifère. Qu’est-ce que ce trésor découvert dans sa tombe, trouvé intact, nous apprend sur le jeune pharaon, et d’abord, s’agit-il de son trésor ? Marc Gabolde : La tombe de Toutankhamon n’apprend pratiquement rien sur sa vie, ses origines ou les causes de sa mort. Le trésor n’a livré que deux objets qui renseignent sur deux évènements anecdotiques sur son existence : une canne faite d’un roseau que le roi a coupé de ses propres mains dans une roselière du delta proche de la future Pi-Ramsès et un éventail de plumes provenant d’autruches que le roi a chassées à l’est d’Héliopolis. De manière plus indirecte, la tombe a confirmé que sa seule épouse connue est sa sœur, la princesse Ankhesenpaaton / Ankhesenamon et que sa progéniture s’est limitée à deux fœtus de sexe féminin qui ne vécurent jamais. Les provisions informent indirectement sur son régime alimentaire et son goût pour les vins sucrés. En fait, assez logiquement, la vie de Toutankhamon est absente de sa tombe. Quant à l’origine d’une grande partie du trésor de Toutankhamon, l’examen de plusieurs pièces permet d’être définitif. Rien que dans les pièces exposées à La Villette, on peut certainement attribuer à un prédécesseur de Toutankhamon les bandes d’or qui enserraient la momie, le petit sarcophage miniature à viscères en or, le coffret marqueté en bois rouge semi-circulaire et l’un des arcs composites (Carter n° 48-h ; JE 62517). Les traces du nom du commanditaire original attestent qu’il s’agît d’une reine-pharaon qui a régné entre Akhenaton et Toutankhamon. La statuette en bois doré du roi sur la panthère laisse apparaître une poitrine féminine indiscutable et a bien évidemment été réalisée pour elle. Comme ces attributions incontestables ne concernent que les objets où les traces d’un premier propriétaire sont clairement discernables, il est bien évident que le nombre de pièces « usurpées » doit en fait être beaucoup plus élevé. La plupart des égyptologues pensent que ce roi-féminin est Nefertiti, mais des arguments plus convaincants permettent d’y voir plutôt la fille aînée d’Akhenaton et Nefertiti, la princesse Merytaton, dont des rondelles d’or du tombeau portent les deux cartouches royaux avec le nom de naissance Merytaton parfaitement lisible. En somme, une partie importante du trésor de Toutankhamon n’est pas le trésor de Toutankhamon. On sait aujourd’hui qu’Howard Carter et Lord Carnarvon avaient pénétré dans la chambre funéraire avant son ouverture officielle … Marc Gabolde : Il est en effet certain qu’entre le 26 novembre et le 1er décembre 1922, Lord Carnarvon, sa fille Lady Evelyn et Howard Carter ont pénétré dans la chambre funéraire, laissant Arthur Callender faire le guet dans l’antichambre. La carte de vœux de Lady Evelyn à Carter du 26 décembre 1922 fait vaguement allusion à cette visite qui est confirmée par le journal du demi-frère de Carnarvon, Mervyn Herbert. Celui-ci fut informé par sa nièce le 16 février 1923, alors qu’il montait vers la vallée des rois pour l’ouverture officielle de la chambre funéraire, des merveilles qu’il allait bientôt contempler. Deux articles d’Alfred Lucas, le chimiste de l’équipe, publiés dans les Annales du Service des Antiquités de l’Égypte de 1942 et 1947 confirment que la « brèche des voleurs » pratiquée dans la porte conduisant à la salle du sarcophage avait été creusée, rebouchée et scellée à nouveau par Carter et n’avait rien d’antique. Il est également assuré que quelques objets ont été sortis de l’hypogée à cette occasion dont certains se sont retrouvés dans les collections personnelles de Carter et Carnarvon. La tombe de Toutankhamon n’a pas les caractéristiques d’une tombe royale. Comment l’explique-t-on ? Marc Gabolde : Ni par ses dimensions, ni par son plan, la tombe de Toutankhamon ne correspond à une tombe royale. Pas de puits funéraire, pas de chambre funéraire à six piliers, très peu d’annexes. Lorsque le roi est mort au tout début de l’an X de son propre règne, il est vraisemblable que sa propre tombe était dans un tel état d’inachèvement qu’il n’était pas envisageable de l’y enterrer, même en travaillant jour et nuit pendant les soixante-dix jours de la momification. Il fut donc décidé de l’inhumer dans une tombe de noble qui était facilement modifiable pendant ce court laps de temps pour l’accueillir. Quant à la véritable tombe de Toutankhamon, elle n’a pas été identifiée. Certains ont proposé la tombe de son successeur, Aÿ, dans la Vallée de l’Ouest (WV 23), mais elle est également inachevée et ce qui subsiste correspond à environ quatre années de travail de creusement, soit la durée du règne d’Aÿ. La tombe d’Horemheb serait une excellente candidate bien qu’également inachevée. Elle est très vaste et décorée de bas-reliefs peints alors qu’il n’a régné que treize à quatorze années. Comme les dépôts de fondation de ces tombeaux n’ont pas été retrouvés, il est possible que leur découverte apporte un jour un éclairage sur la question de la véritable tombe de Toutankhamon. La thèse de Nicholas Reeves qui attribuait l’appartenance de la tombe à une femme-pharaon, et peut-être à Nefertiti, a été remise en question très récemment. Quelle est votre analyse ? Marc Gabolde : Dès le début de ces travaux j’ai exprimé des doutes. Ce qui a été observé, ce sont des hétérogénéités de surface, des différences de température (d’un 10e de degré) et des échos radar difficiles à interpréter en raison du substrat très fissuré de la montagne thébaine. Rien de tout cela n’était en soi une pièce cachée. Les nouveaux examens avec des radars de sol n’ont rien révélé en matière de chambres secrètes. À mon avis, la momie de Nefertiti n’est plus à chercher puisqu’il y a de forte chance pour que ce soit la « Young Lady (KV35YL) » de l’une des cachettes de la tombe d’Amenhotep II. L’époque de Toutankhamon est surtout marquée par ses parents, Akhenaton et Néfertiti, en raison de l’instauration d’un monothéisme … Marc Gabolde : Le règne de 17 années d’Akhenaton est marqué par l’émergence de la première vénération d’une divinité unique de l’histoire. Les théologiens modernes sont souvent réticents à utiliser le terme de « monothéisme » plus en raison d’une définition étroite du mot dans les dictionnaires que du fait de la nature de la dévotion pratiquée par Akhenaton, centrée sur le globe solaire, en égyptien Aton. Si, du point de vue dogmatique, la nature de l’« atonisme » est difficile à définir, du point de vue de la forme (espaces de cultes, rites, prières), c’est assurément un monothéisme. Il est vrai que ce culte exclusif d’une seule entité divine est bien différent de ceux qui lui ont succédé : judaïsme, christianisme et islam. En premier lieu, ce « dieu » n’est pas transcendant (en dehors du monde sensible) mais immanent (il appartient au monde sensible) puisque qu’il s’agit de la lumière émanent du soleil, visible par tous. D’ailleurs, la « religion » d’Akhenaton appartient à un courant de pensée qui ne prend en considération que les phénomènes accessibles aux sens et qui marginalise tout ce qui pourrait être atteint par une démarche spirituelle ou intellectuelle, tournant le dos à des siècles de théologie. Pour employer la terminologie d’Albert Camus, cette attitude philosophique serait la forme radicale d’une « phénoménologie » qui nait sous la XVIIIe dynastie. En second lieu, contrairement aux trois religions du livre, il n’y a pas de révélation divine. Le dieu n’a rien à dire, à l’inverse des bavardes divinités égyptiennes traditionnelles, En revanche, il agit en répandant sur le monde lumière, chaleur, vie qui sont des manifestions de sa perfection et de son amour. En conséquence, Aton n’a aucune dimension éthique : il ne châtie ni ne récompense, contrairement au Dieu de la Bible. Comme Aton est un dieu essentiellement muet, Akhenaton n’est pas son « prophète ». C’est un ritualiste dont le rôle est essentiellement de consacrer des offrandes et il n’est ni l’intellectuel ni vraiment le chef spirituel du culte qu’il pratique. D’ailleurs, les seules prières connues à l’époque sont le fait des courtisans qui prient autant le roi qu’Aton et manifestent une piété personnelle peu répandue auparavant. Akhenaton n’a jamais été l’auteur des fameux hymnes à Aton. Le culte exclusif d’Aton n’a guère survécu à Akhenaton et dès l’an II de son énigmatique successeur féminin, le panthéon traditionnel fut de nouveau honoré. Les raisons de cette apostasie sont malaisées à déterminer. On peut citer trois évènements qui ont pu jouer un rôle : 1) Le culte du disque solaire Aton était le culte personnel du roi. À la mort de son promoteur, il n’avait aucune raison objective de subsister. 2) Les armées égyptiennes avaient été défaites en Syrie et une tentative d’alliance matrimoniale avec les Hittites avait échoué, mettant en péril l’empire égyptien d’Asie. 3) Une pandémie sévissait alors au Proche-Orient dont l’origine égyptienne est assurée. Combinés, ces trois évènements ont pu être compris comme une vengeance des dieux délaissés et précipiter la chute du culte exclusif du globe solaire Aton. Le roi s’était fourvoyé, il était urgent de rouvrir les temples d’autrefois. Il y a néanmoins une leçon à retenir pour l’époque moderne: ce premier monothéisme a échoué, ce qui remet en cause le déterminisme historique affiché de la plupart des monothéismes ultérieurs. Ce nouveau culte révolutionne les pratiques et notamment les coutumes funéraires… Marc Gabolde : La rupture la plus brutale provoquée par Akhenaton réside certainement dans les pratiques funéraires où l’au-delà disparait complètement de l’iconographie et des textes, même si une âme (le « ba ») semble survivre à l’individu. Seuls deux tableaux subsistent dans les tombes de l’élite: la déploration du cadavre et l’hommage à la statue, qui sont deux scènes résolument ancrées dans l’ici-bas. Le judaïsme primitif était lui aussi dépourvu de véritable au-delà organisé, ce qui avait provoqué un grand étonnement chez Spinoza. A-t-on aujourd’hui toute certitude quant aux liens de filiation entre Akhenaton, Nefertiti et Toutankhamon ? Les tests ADN pratiqués en 2010 avaient apporté des éléments d’éclairage… Marc Gabolde : Un bloc remployé à Hermopolis assure que Toutankhamon (alors nommé Toutankhouaton) est bien un « fils du roi de sa chair, son aimé » et une légende adjacente indique qu’il avait au moins une sœur ou demi-sœur. Le module de la pierre montre que la gravure n’est pas antérieure au règne d’Amenhotep IV — Akhenaton. Par déduction, ce dernier roi a donc toutes les chances d’être son père. Toutefois, dans des dédicaces gravées au temple de Soleb en Nubie et au temple de Louqsor, Toutankhamon affirme que son père est Amenhotep III. Tout aussi curieusement, sur des blocs du mémorial construit par son successeur, le roi Aÿ, ce dernier appelle Toutankhamon « son fils ». Deux pères supplémentaires pour un seul roi, c’est bien trop. En fait, il faut se méfier de ces inscriptions qui n’ont pas la valeur d’un véritable état civil. Amenhotep III est une divinité à Louqsor comme à Soleb et tout roi est nécessairement le « fils » du dieu honoré dans le sanctuaire. Quant à Aÿ, il est qualifié de « père du dieu » dès le règne d’Akhenaton et a gardé cette qualité sous Toutankhamon. Il était à peu près trois fois plus âgé que son prédécesseur, ce qui était suffisant pour lui attribuer la paternité fictive de Toutankhamon. Il faut donc faire confiance à l’inscription qui date de l’époque où Toutankhamon était prince et envisager que son père soit Akhenaton. Comme ce dernier fut considéré comme un roi indigne dès le règne de son fils, Toutankhamon dut, en quelque sorte, renier son ascendance, d’où le silence délibéré des sources. Pour la mère de Toutankhamon, les indications textuelles sont encore moins nombreuses. Toutefois, une inscription dans la tombe royale d’Amarna légende un enfant dans les bras de sa nourrice dans des scènes relatives aux funérailles de la 3ème fille d’Akhenaton et Nefertiti, Maketaton. Le texte ne préserve que « […] né / née de [la grande épouse royale (…) Nefertiti], vivante pour le temps et l’éternité ». Comme cet enfant ne peut pas être l’une des six filles de Nefertiti — non seulement toutes sont nées à ce moment-là, mais trois sont déjà mortes — il est logique d’en faire un septième enfant de Nefertiti et, dans ce cas, Toutankh(ou)aton / Toutankhamon est le meilleur choix. D’autres candidates à la maternité de Toutankhamon ont néanmoins été proposées : la reine Tiyi, la princesse Satamon, l’épouse secondaire d’Akhenaton, Kiya, la fille aînée d’Akhenaton, Merytaton et, dernièrement, une sœur inconnue d’Akhenaton L’étude des prélèvements ADN effectués en 2008 par Zahi Hawass et une équipe internationale pluridisciplinaire a permis d’assurer que son père est bien l’individu dont la momie réduite à l’état de squelette se trouvait dans la tombe KV 55 de la vallée des rois. L’examen des inscriptions du cercueil, des vases canopes et des briques magiques de la tombe KV 55 indique qu’il s’agit d’Akhenaton, bien que des estimations de l’âge au décès aient conclu hâtivement que les restes étaient ceux d’un jeune homme d’à peine plus d’une vingtaine d’années. Quant à la mère, les généticiens ont conclu qu’il devait s’agir d’une sœur utérine d’Akhenaton. Toutefois, celle-ci n’aurait laissé aucune trace dans la documentation, ce qui n’est guère envisageable pour une personne qui aurait été à la fois fille de roi, sœur de roi, épouse de roi et mère de roi… En fait, à la génération antérieure, il semble bien qu’Amenhotep III ait épousé sa cousine germaine, Tiyi. En effet, Amenhotep III partage 1/3 de son ADN avec son beau-père, Youya, ce qui ne s’explique convenablement que si son beau-père est aussi son oncle… Si, à la génération suivante, cette tradition s’est perpétuée et qu’Akhenaton a épousé sa cousine, issue elle aussi de mariage entre cousins appartenant aux mêmes familles, alors l’ADN des époux, faute de brassage génétique, peut ressembler à celui d’un frère et d’une sœur. Cette solution a l’avantage de s’accorder aussi bien avec les données des généticiens qu’avec les sources textuelles. Que sait-on de la vie de Toutankhamon et de son règne personnel ? Marc Gabolde : Hors de la vallée des rois, les témoignages des contemporains de Toutankhamon sont nombreux et souvent d’une grande qualité, malgré les destructions liées à la persécution de sa mémoire par ses successeurs ramessides. La nécropole de Saqqarah a livré des tombes remarquables, comme celles d’Horemheb et de Maya et à Thèbes, beaucoup de restaurations et de statues sont redevables aux artisans de Toutankhamon. De manière très significative, la Nubie, qui était essentielle pour l’approvisionnement en or, a conservé les restes de deux temples de Toutankhamon, à Faras / Aniba et à Kawa. Enfin, beaucoup de stèles, statues et objets de contemporains du roi sont connus et attestent d’un règne ambitieux et fécond, comparable aux règnes d’autres souverains prestigieux. A-t-il eu une épouse, ou une descendance ? Marc Gabolde : En plus de sa sœur utérine, Ankhesenpaaton / Ankhesenamon, comme tout pharaon, il avait probablement un harem, mais aucun document ne donne d’indication sur ces épouses secondaires. Dans la tombe du vice-roi de Nubie Houÿ, une princesse nubienne, avec un couvre-chef extraordinaire et montée sur un char tiré par des bovidés, est entraînée dans la procession des vassaux nubiens apportant leurs produits. Il est difficile de déterminer si elle fait partie des tributaires ou du tribut. Les deux fœtus féminins retrouvés dans le tombeau sont sa seule progéniture connue. Ces fillettes n’ont pas vécu et leurs cercueils ne portent que le nom du roi. L’étude de leur ADN, très dégradé, s’accorde pour que Toutankhamon soit leur père. En revanche, ils pourraient être de deux mères différentes et rien n’indique à coup sûr qu’Ankhesenamon est l’une de ces mères ou la mère des deux. Toutankhamon décède relativement jeune. En connaît-on les raisons ? Il semblait souffrir de nombreuses pathologies … Marc Gabolde : Décédé à 17 ou 18 ans, Toutankhamon n’est pas mort de vieillesse. Les causes de décès à cet âge sont limitées : maladie, accident ou assassinat. Le meurtre par traumatisme doit être écarté : aucune marque de blessure volontaire létale n’a été identifiée.Le poison pourrait être envisagé, on n’en a pour l’instant pas retrouvé de trace. Restent donc l’accident ou la maladie, ou les deux. Pour les pathologies, on a l’embarras du choix. La littérature sur les affections dont aurait souffert Toutankhamon est impressionnante et le tableau inquiétant. On trouve pêle-mêle : pied-bot, maladie de Kohler, cyphoscoliose, paludisme qui sont des affections invalidantes mais non mortelles. Comme causes principales ou secondaires du décès ont été évoqués : la peste — on sait qu’une pandémie sévissait à cette époque au Proche-Orient —, la maladie de Klinefelter et/ou la maladie de Wilson, le méningiome, la drépanocytose et/ou la maladie de Gaucher, la tuberculose, le syndrome de Marfan et, enfin, l’épilepsie. Toutankhamon est un excellent malade. L’une des propositions les plus récentes suppose que le roi aurait eu le fémur fracturé à la hauteur du genou, ce qui aurait provoqué une infection osseuse puis une septicémie fatale sur un organisme frêle. Quant à ce qui a provoqué la fracture, les possibilités d’accident en Égypte antique sont innombrables, sans avoir à évoquer une mort au combat, un accident de char, un coup de sabot de cheval, voire une collision avec un hippopotame comme cela a été avancé. Charles VIII est mort accidentellement le 7 avril 1498 après avoir simplement heurté de la tête un linteau bas du château d’Amboise… Les opérations de momification le concernant semblent avoir été bâclées. Comment l’explique-t-on ? Marc Gabolde : Ce n’est pas exact. Au contraire, la momie a souffert d’un excès de tout plus que d’un défaut en quoi que ce soit. Les amulettes sont en double ou triple exemplaire. Le crâne a été excérébré selon deux techniques. Les produits de momification ont été employés en quantité bien supérieure à ce qui était nécessaire. Il fallait, pour ce roi mort trop tôt, faire un Osiris parfait. C’est probablement cette surabondance qui a provoqué une dégradation de la dépouille dont les chairs étaient craquelées et les bandelettes réduites à l’état de matière brune et pulvérulente. Certains ont même évoqué une sorte d’auto-combustion de la momie due aux réactions chimiques exothermiques des produits de la momification avec les chairs et les enveloppes textiles. Propos recueillis par Sylvie Dutot, rédactrice en chef d’Histoire Magazine.
ENTRETIEN AVEC Marc GABOLDE… Le Mystère TOUTANKHAMON
Article de la revue Histoire Magazine N4
Que sait-on aujourd’hui d’un des plus célèbres pharaons de l’Antiquité égyptienne ? Marc Gabolde est le spécialiste reconnu de l’histoire de la fin de la XVIIIe dynastie. Il fait le point pour HISTOIRE MAGAZINE sur les plus récentes découvertes. Entretien ...
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À propos de l’auteur
Sylvie Dutot
Sylvie Dutot dirige courageusement Histoire Magazine, un titre de référence qui se démarque pas ses sujets iconoclastes, ses plumes prestigieuses et une identité bien à lui. Malgré les embûches, les difficultés inhérentes au secteur de la presse, la directrice de publication poursuit son aventure sans faillir.