Derniers jours à Kiev met en scène trois personnages dans l’Ukraine de 1919. Le régime tsariste s’est effondré, la guerre civile fait rage, Français et Anglais aident, modestement, les Blancs contre les Bolcheviks : « De là les villages dévastés et incendiés, les bêtes abattues, les femmes violées, l’ami d’enfance tuant sans remords le compagnon de sa jeunesse. Chacun rendant à l’autre la monnaie de sa pièce. » (p. 122). Il y a Kyria, comtesse qui découvre l’âpreté de la vie et la joie du corps aimé, Mendel le violoniste juif qui apprend que la survie est plus importante que la foi, Nicolas l’officier de la Garde impériale hautain prêt à tout pour ne pas être tué. Elle rêve de chevaucher librement dans la steppe, le second de concerts de musique classique, le dernier d’honneurs. Elle est déterminée, il est un peu effarouché, le troisième est sans scrupule. C’est aussi un triangle amoureux puisque les deux hommes, si différents, se disputent la belle aux yeux verts. Leurs pérégrinations nous font découvrir les shtetls et les pogroms, les bals désuets des restes de l’aristocratie russe et les combats de l’armée de Dénikine, le travail en usine et les actions de l’Agit Prop, les plaines vidées de tout habitant et charniers oubliés. Pas de happy end car le livre se referme sur trois destins qui restent suspendus. Trois personnages que nous avons aperçus un moment avant qu’ils ne disparaissent vers de nouvelles existences.
Derniers jours à Kiev
par Albert Kantof
Éditions Pierre de Taillac, 2023, 271 pages, 19,90 euros